Lors de leur visite à Verbier l’an dernier, Rui Sousa et Antonio Abreu de MADproductions ont été si enthousiasmés qu’ils ont souhaité partager leur expérience avec Verbier Life. Ils passent une grande partie de leur temps à explorer de nouveaux sentiers et de nouveaux pays, à se familiariser avec diverses cultures, tout en photographiant et filmant leur parcours. Une toute nouvelle passion pour Verbier a solidement ancré cette destination parmi leurs grands favoris…
Lorsque j’ai songé à me rendre sur les paysages ensoleillés de Verbier, je n’ai jamais pensé y débarquer en l’automne, au moment où le temps devient incertain. Je n’imaginais pas non plus que ce serait la période idéale pour explorer certains des meilleurs monotraces au cœur de l’Europe, et que je découvrirais bien assez tôt qu’une mauvaise journée à Verbier, ça n’existe pas.



À notre retour au Châble, l’odeur des patins carbonisés se mêle aux arômes d’un festival local de vin et de fromage. Il semble y avoir toujours une bonne raison de s’emplir de fromage et de vin en Suisse.
Les jours suivants font place à une alternance de hauts et de bas émotionnels, surtout lorsque nous quittons notre zone de confort près du Verbier Bikepark et nous engageons dans une nouvelle aventure sur monotrace près du barrage d’Émosson. L’eau du barrage est acheminée à travers une galerie d’amenée jusqu’à une centrale électrique située plus bas à Martigny. Le dénivelé négatif entre le barrage et la centrale électrique est d’à peu près 1’400 m, le même que celui de notre parcours. La première partie du sentier est principalement constituée de gros rochers parfaitement alignés, dans un dédale de montées et de descentes, nous permettant néanmoins d’avoir toujours suffisamment de vitesse pour atteindre la section suivante. La seconde partie du sentier est très roulante, passant au travers de tronçons glaiseux et d’éléments naturels, dans un décor essentiellement constitué de pins et de chênes gigantesques. Parvenir jusqu’en bas est un défi, un voyage épique à vivre et auquel il faut survivre. Comme le mariage ?
Tandis que je suis à Verbier sur mon vélo, mon esprit ne peut ignorer les hautes montagnes de l’autre côté de la vallée, remplies de neige fraîche et de buissons rougeoyants. Aucun bikepark, une ou deux routes coupe-feu et quelques maisons, voilà ce que l’on trouve en face de Verbier. « Ça s’appelle le Col de Mille et c’est assez épique », dit Phil en acceptant de nous y emmener. Manifestement, il connaît la zone comme un chien connaît son propriétaire. Une baguette, une barre de chocolat de plus, deux bananes, deux litres d’eau et une « petite » tranche du gâteau aux myrtilles de la veille ne laissent que peu de place dans mon sac à dos lorsque nous nous mettons en route. « La civilisation se termine ici, c’est parti pour l’aventure les gars ! », crie un Phil surexcité. L’ascension démarre autour de 1’600 m et monte jusqu’à 2’500 m en combinant parfaitement pédalage et portage, nous menant le long d’un itinéraire détourné jusqu’au sommet. La course vous laisse à bout de souffle et plus avide que jamais en particules d’O2 et de H2O. À 2’000 m, nous atteignons une intersection, une transition entre route coupe-feu et paradis du monotrace. En regardant plus haut les 500 m de portage suivants jusqu’à la cabane située au sommet, Phil nous promet une délicieuse tasse de café à notre arrivée. Avec une poche pleine de myrtilles sauvages, je parviens à trouver l’équilibre parfait sur la section de portage suivante : une main sur le pédalier et l’autre faisant le va-et-vient entre ma poche et ma bouche. Les myrtilles réduisent les lésions musculaires après un effort vigoureux et favorisent la mémoire, deux choses dont je vais sûrement avoir besoin pour le prochain jour de vélo et pour les années à venir ! Lors de la traversée, nous faisons la rencontre d’un couple de chevaux trottant à vive allure. Ils s’arrêtent au bord du monotrace, sentent nos vêtements, nos sacs à dos ainsi que nos vélos et, après deux minutes insolites, poursuivent leur chemin. Alors que nous arrivons au sommet du Col de Mille dans un froid cinglant, je me mets à pédaler plus vite afin d’obtenir le café dont j’ai tant besoin, pour découvrir ensuite que la cabane a fermé le jour précédent, une semaine avant la date prévue. Je m’allonge sur le sol en position fœtale, écrasant une poignée de fruits restée dans ma poche. Zut ! Le vent me lacère la peau et les lèvres alors que l’automne cède peu à peu la place à la saison d’hiver. « Je ne peux pas sentir mes mains… mais j’adore ça », chante Rui d’une voix grelottante, rendant la situation hilarante.
Lors d’une sortie ordinaire, la liberté n’est qu’une illusion. Vous devez rentrer chez vous car vous avez à faire, déposer les enfants au cours de piano, assister à un nouveau déjeuner d’entreprise : votre sortie est compromise par le programme de la journée. Mais quand je pars derrière Phil et Rui, je réalise ce qui libère mon esprit : je ne sais pas où je vais, combien de dénivelé positif et négatif mes jambes fatiguées vont avaler… et cela m’est plutôt égal. Éléments naturels, arêtes monumentales et paysages magnifiques rendent la course à la fois unique et valant la peine de se battre. Je suis simplement en quête de liberté au cœur de ces montagnes colossales. À la fin de notre semaine, je crois que je comprends pourquoi Steve revient faire du vélo à Verbier chaque année. Pour l’aventure ? Les amitiés ? Les monotraces ? La nourriture ? La liberté ? On trouve toutes les réponses ici à Verbier.
